18 bis ⸱ Le premier rêve du monde
A. SIBRAN
Anne Sibran – GALLIMARD
Cézanne, un autre regard
Dans ce roman sur le regard et la vue, Cézanne, déjà vieillisant, consulte un ophtalmologiste qui cherche à rendre la vue aux aveugles de naissance. De cette rencontre déterminante entre celui qui perd la vue et celui qui la donne naît un magnifique dialogue sur le beau, la lumière. Un livre pictural autant que poétique.
Ce roman n’est pas ininterressant même si la qualité de l’écriture est irrégulière. Mais j’ai beaucoup de mal à aimer ces biographies tellement romancées qu’on “apprend” des choses complètement fausses sur un personnage historique. Pourquoi appeler le peintre de ce roman Paul Cezanne? Parce que l’écrivaine l’aime? Parce qu’elle le décrit comme animiste (voir le site de l’auteur) et qu’elle peut l’intégrer à l’histoire d’une chamane indienne qu’elle a envie de raconter? Les rencontres autour de Cezanne semblent complètement inventées et sans aucun fondement. Madame Sibran aurait tout aussi bien pu appeler son peintre Paul Durand.
Assez d’accord avec Marie L., le personnage de Cézanne semble finalement anecdotique. Nous ne sommes pas du tout dans la biographie mais bel et bien dans le roman. Cela dit, la rencontre et les échanges entre l’artiste et le scientifique sont intéressants. Concernant le style, j’avoue avoir trouvé certains passages franchement longs et un peu trop “envolés” voire forcés.
un livre sur le Dr Racine aurait largement suffi, le prétexte de Cézanne comme “accroche”? et que de considérations lyriques se voulant poetiques!
J’ai trouvé le texte d’une poesie inouie . L’histoire de la medecine en ophtalmologie m’a bcp interessée.
j’ai vu la place de Cézanne dans un role ,de “”traducteur ” entre la fonction visuelle et la lecture que l’on fait de ce que l’on voit .! Cézanne est soulagé dans sa fonction visuelle par le traitement medical , et le medecin, avec Cézanne, apprend à regarder la nature , la peinture .Magnifique . j’ai noté 5
Ce livre nous renvoie à la fin du XIX ème siècle, lorsque de nombreux artistes, considérés aujourd’hui comme des génies, souffraient presque inévitablement de maux qui nous paraissent maintenant bien archaïques. Ainsi l’absinthe a détruit les neurones de Maupassant ou de Baudelaire, les troubles psychiques qu’on ne savait pas soigner ont probablement conduit Van Gogh au suicide, la faible lueur des chandelles a rendu aveugle Balzac sur la fin de sa vie. Cézanne, plus chanceux, aurait été, d’après ce roman, sauvé de la cécité due à l’éclat du soleil provençal par un ophtalmologue miraculeux, inventeur de l’opération de la cataracte. Le sujet est intéressant et bien traité. On partage les souffrances et les inquiétudes du peintre. Cependant, Mme Sibran a voulu trop bien faire et a péché par excès en abusant des personnages secondaires et même tertiaires. Emile Zola était un ami d’enfance de Cézanne, mais il n’avait vraiment rien à faire dans ces pages. Certes, il mourut d’asphyxie, mais il eut pendant toute sa vie bon pied et surtout bon oeil. Bref, j’aurais aimé retirer de ce récit une bonne centaine de pages pour qu’il devienne… la prunelle de mes yeux.